Abordons
maintenant la question des agrocarburants côté chiffres , en faisant
toutefois en sorte que cette approche ne devienne pas trop rébarbative .
Ceux
qui voudraient appronfondir la sujet sous cet aspect pourront consulter
avec profit le site de Jean-marc Jancovici
Besoin
de carburant en France: environ 100 000 000 tonnes par an (100 M de t /
an)
Superficie
de la france métropolitaine environ 550 000 km²......soit
55 000 000 d'hectares (55 M ha)
Superficie
des terres cultivables Environ 55% du territoire , soit :
30 000 000 d'hectares
Rendement
en huile du colza entre 900 et 1600 litres/ha
Rendement
en huile du tournesol entre 500 et 1100 litres/ha
Nous
voyons déjà que si l'on voulait produire l'énergie dont nous
avons besoin(100 000 000 tonnes/an) avec du colza il nous faudrait une
surface de :
100
M t : 1,5 t/ha = 66 000 000 d'hectares.....soit plus du
double de toute la surface cultivable en france .
Et
surtout noubliez pas que pour produire cette quantité d'huile de colza
il aura malgré tout fallu utiliser des millions de tonnes de gazoil (ou
autres énergies)
Sachant
qu'il faut 0,5 tonne de gazoil par
hectares pour produire ce carburant à base de colza
...cela
nous fait 15 000 000 de tonnes de gazoil pour cette
production .
Le
rendement d'une tonne de graine de tournesol est environ de 300 à
400 l et de 700 à 600 kg de tourteau .
La
france consomme environ 100 millions de tonnes de pétrole, dont
50 millions de tonnes sont allées aux transports, soit plus de la
moitié de notre consommation de pétrole totale, et près des 2/3 de la
part réservée aux usages énergétiques .
Filière
|
Culture initiale
|
Poids brut de carburant obtenu
par hectare (tonnes)
|
tonnes équivalent pétrole par
tonne de carburant
|
Energie brute
produite par Ha (tonnes équivalent pétrole)
|
Nombre minimum de km2
mobilisés pour produire 50 Mtep
|
en % du territoire français
|
en % des superficies cultivées
1997
|
Huile |
Colza |
1,37
|
1
|
1,37
|
365.000
|
66%
|
232%
|
Huile |
Tournesol |
1,06
|
1
|
1,06
|
472.000
|
86%
|
300%
|
Ethanol |
Betterave |
5,78
|
0,69
|
3,98
|
125.500
|
23%
|
80%
|
Ethanol |
Blé |
2,55
|
0,69
|
1,76
|
284.000
|
52%
|
183%
|
source
:
rapport DIREM/ADEME
sur les biocarburants, 2003
Les promoteurs des agrocarburants nous font maintenant
l'éloge de la betterave, qui
dispose d'un bien meilleur rendement.
Malheureusement, les choses
ne sont pas si simples. En effet, il faut tenir compte des
étapes
qui permettent de passer de la plante au carburant. Il faut alors
déduire l'énergie nécessaire
à la production des engrais, à l'utilisation d'engins
agricoles pour la culture et la récolte, aux moyens de
transports, et enfin aux traitements après la récolte.
On parle souvent, pour l'énergie qui a servi à tout
cela, de "consommations intermédiaires".
Voilà ou les
problèmes
commencent,
pour le colza, le tourteau
représente une grosse moitié du poids de la graine (l'huile
représentant une petite moitié) (source Prolea). Une
allocation au poids entre l'huile - qui donnera le biocarburant - et le
tourteau conduit donc à n'affecter au biocarburant "que" un peu moins
de 50% de l'énergie nécessaire à la fabrication des engrais (et "que"
un peu moins de 50% de l'énergie liée à l'utilisation des engins
agricoles),
pour les betteraves, les
pulpes - c'est-à-dire ce qui reste après extraction du jus riche en
sucre - représentent environ la moitié de la matière sèche totale
(l'autre moitié est du sucre), puis une fois que la fermentation a eu
lieu, les vinasses déshydratées et autres sous-produits représentent
facilement, encore, quelques dizaines de % du poids de ce qui est
obtenu après distillation (laquelle distillation consomme énnormément
d'énergie.
Si
nous effectuons le calcul du
rendement de manière conservatrice, c'est-à-dire
en affectant au biocarburant l'ensemble des consommations
intermédiaires
(ce qui semble logique si nous considérons que l'élevage
industriel des animaux ne croît pas dans un monde qui souhaite
se passer de pétrole, et donc que les sous-produits ne
vaudront rien, ou pas grand chose, si nous multiplions la production
de biocarburants par 10 ou 50), la prise en compte de ces consommations
intermédiaires va nous amener à des productions
nettes très inférieurs, et quasi-nulle pour l'éthanol
à base de blé. (source Jean-Marc Jancovici)
Bon là vous avez peut être un
peu de mal à tout comprendre....je ne sais pas si çà vous rassurera ,
mais moi aussi .
Bon en fait c'est assez simple
, c'est que ces braves gens considèrent
qu'avec la graine de colza (par exemple) on obtient que 50 % de son
poids en huile , donc ils en déduisent que pour produire l'huile de
colza il ne faut que 50% de l'énergie necessaire à la production du
colza .
Maintenant
qu'est ce qu'on va faire de ces millions de tonnes de résidus de colza
(tourteaux).....mystère....en tout cas l'énergie qui a servi à les
produire n'est pas mise sur le compte des agrocarburants.
Avec
quelques entourloupes comme celle ci , et en jouant sur la confusion
entre énergie brute et énergie nette , on arrive à faire dire aux
chiffres à peu près tout ce que l'on veut ....et à faire croire à tout
ceux qui sont bien content de le croire , parce qu'ils voient là un bon
prétexte pour ne pas remettre leur mode de vie en question....que les
agrocarburants sont une alternative valable pour l'après pétrole .
Nous sommes en présence de
scientifiques et de technocrates....qui par tous
les moyens cherchent un chemin (un raisonnement) pour démontrer ce que
d'avance ils ont choisi de démontrer.
Les
politiques à la botte des puissances financières ont décidés de la
solution....après cela il appartient aux scientifiques des services
institutionnels d'élaborer les arguments et les raisonnements qui y
aboutissent et valident cette solution .
Aussi
incroyable que cela paraisse , c'est comme cela que çà fonctionne.
Seuls
les scientifiques indépendants pourraient nous informer de l'absurdité
de ces raisonnements ....mais il existe très peu de scientifiques
réellement indépendant.....quelques uns le font mais ils sont très
rares....et très courageux .
Filière
|
Culture initiale
|
Energie brute
produite par Ha (tonnes équivalent pétrole)
|
Energie nécessaire pour les
engrais, la culture et la distillation (tonnes équivalent pétrole par
ha)
|
Energie nette
produite par Ha (tonnes équivalent pétrole)
|
Nombre minimum de km2
mobilisés pour produire 100 Mtep
|
en % du territoire français
|
en % des superficies
cultivées
|
Soit la surface cultivable de : |
Huile |
Colza |
1,37
|
0,50
|
0,87
|
1200.000
|
210%
|
400%
|
4
fois la france |
Huile |
Tournesol |
1,06
|
0,29
|
0,77
|
1300.000
|
240%
|
450%
|
4,5
fois la france |
Ethanol |
Betterave |
3,98
|
3,22
|
0,76
|
1300.000
|
240%
|
450%
|
4,5 fois
la france |
Ethanol |
Blé |
1,76
|
1,72
|
0,04
|
30000.000 !
|
5400%
|
10000% !
|
1oo fois
la france |
La
betterave qui semble au départ présenter beaucoup d'intérêt du fait de
sa valeur énergétique brute est ramenée au même rang que le tournesol ,
essentiellement
du fait de la distillation qui est extrèmement consommatrice d'énergie .
Finalement toutes les cultures
sont à peu
près à égalité et restituent environ
0,75 tonne équivalent pétrole par hectare, sauf
le blé qui ne restitue quasiment rien.
Pour
produire 100 millions de tonnes
déquivalent pétrole, il faut donc mobiliser, en ordre
de grandeur, 3 à 4 fois les terres agricoles actuelles... ce qui est
absurde .
Quant à satisfaire 10% de la
consommation actuelle des transports avec
des biocarburants cela nécessiterait la mobilisation de 30 à
40% des terres agricoles actuelles.
On
voit bien que les filières
actuelles des biocarburants ne permettent pas d'espérer
les substituer "un jour" à ce que nous consommons aujourd'hui
comme pétrole, ni même à une fraction significative
de celui-ci.
En clair, considérer que ce
n'est pas grave
d'avoir un mode de vie étroitement dépendant de
ce combustible liquide, et que ce n'est pas grave de gaspiller
l'énergie , parce que le jour venu nous
pourrons tous rouler et nous chauffer au biocarburant tel qu'il
est produit aujourd'hui, est hélas se bercer d'illusions.
Quant
à ceux qui tentent de nous le faire croire , ainsi que ceux qui par pur
égoïsme mettent tant d'empressement à les croire ....ils en porteront
la responsabilité devant les génèrations à venir.
Si nous les laissons faire , ils vont :
supprimer
les forêts
françaises, pour récupèrer 10 millions d'hectares de terres
arables,
tout
planter en betteraves
sucrières,
utiliser
la chaleur de
centrales nucléaires pour faire les engrais , et pour fournir
les
calories des traitements thermiques intermédiaires:distillation,
séchage, etc.
Avec à la clef
plusieurs dizaines de réacteurs nucléaires supplémentaire!
Il
apparaît donc que jamais
les biocarburants ne permettront de conserver l'abondance actuelle
de carburants liquides.
Espérer
produire 20% des carburants routiers actuels à partir de biocarburants
(rendement net), soit 15 Mtep environ, est probablement une limite
haute, dans un cas de figure très favorable.
Au niveau mondial on estime
qu'il y a 1.400 millions d'hectares de terres
arables (source FAO).
En prenant la réfèrence
de 1 tonne de carburant pour un hectare cultivé ,
nous voyons qu'en mettant toutes ces terres en cultures nous
obtiendrions
1400 millions de tonnes d'équivalent pétrole, alors
que le monde en consomme aujourd'hui.....3500 millions de tonnes.
Aujourd'hui
on laisse croire que les agrocarburants , appelés improprement bio
carburants , ne polluent pas....rien n'est plus faux .
Le
carburant "bio" n'existe pas , et les agrocarburants provoquent quant à
eux toutes sortes de pollutions .....mais cela est une autre histoire ,
dont j'aurais peut être l'occasion de vous entretenir plus tard .
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